La Déclaration d'Utrecht (1889)
Un texte fondateur du vieux-catholicisme :
La Déclaration d'Utrecht a été rédigé en 1889 par les trois évêques vieux-catholiques hollandais, Johannes Heykamp, Casparus Johannes Rinkel et Cornelius Diependaal, avec l'évêque vieux-catholique allemand Joseph Hubert Reinkens et l'évêque catholique-chrétien suisse Eduard Herzog. (cf. photo ci-dessous). Ce texte n'est pas à proprement parler une confession de foi, bien qu'elle soit devenue avec le temps un texte de référence pour le vieux-catholicisme.
In nomine ss. Trinitatis.
Johannes Heykamp, archevêque d'Utrecht,
Casparus Johannes Rinkel, évêque de Haarlem,
Cornelius Diependaal, évêque de Deventer,
Joseph Hubert Reinkens, évêque de l'Eglise vieille-catholique d'Allemagne,
Eduard Herzog, évêque de l'Eglise catholique-chrétienne de la Suisse,
réunis à Utrecht le vingt-quatre septembre mil huit cent quatre-vingt-neuf dans la demeure archiépiscopale,
sous l'invocation du Saint-Esprit, publient la déclaration suivante :
A l'Église catholique.
Assemblés en conférence, à l'invitation de l'archevêque d'Utrecht, soussigné, nous avons décidé de nous réunir désormais de temps à temps pour délibérer de nos intérêts communs tout en appelant en consultation nos collaborateurs, conseillers et théologiens.
Dans notre première session, nous avons jugé bon de résumer succinctement dans une déclaration collective les principes ecclésiastiques selon lesquels nous avons exercé, et nous exercerons à l'avenir, nos fonctions épiscopales, et que nous avons maintes fois eu l'occasion d'énoncer dans des déclarations individuelles.
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1. Nous nous tenons fermement à ce principe de l'Église ancienne que Vincent de Lérins a exprimé en ces termes : Id teneamus, quod ubique, quod semper, quod ab omnibus creditum est; hoc est etenim vere proprieque catholicum [Nous tenons pour vrai ce qui a été cru partout, toujours et par tous; car ceci est vraiment et à proprement parler catholique].
C'est pourquoi nous retenons la foi de l'Église ancienne, telle qu'elle est proclamée dans les Symboles œcuméniques et dans les décisions dogmatiques, universellement reconnus, des Synodes œcuméniques de l'Église indivise du premier millénaire.
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2. Nous rejetons les décrets du Vatican, promulgués le 18 juillet 1870, sur l'infaillibilité et l'épiscopat universel ou omnipotence ecclésiastique du pape de Rome comme étant en contradiction avec la foi de l'Église ancienne et détruisant l'ancienne constitution ecclésiastique. Cela ne nous empêche pas de reconnaître le primat historique tel que plusieurs conciles œcuméniques et les pères de l'Église ancienne, avec l'assentiment de l'Église entière du premier millénaire, l'ont accordé à l'évêque de Rome en tant que primus inter pares [le premier parmi des égaux]
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3. Nous rejetons aussi la déclaration de Pie IX, en 1854, sur l'Immaculée Conception de Marie comme étant non fondée dans les Saintes Écritures et dans la Tradition des premiers siècles.
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4. En ce qui concerne les décrets dogmatiques promulgués par l'évêque de Rome, les bulles Unigenitus, Auctorem fidei, le Syllabus de 1864, etc., nous les rejetons dans le mesure où ils sont en contradiction avec l'enseignement de l'Église ancienne, et nous ne les reconnaissons pas comme déterminants. En outre, nous renouvelons toutes les protestations que la vénérable Église catholique de Hollande a autrefois élevées contre Rome.
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5. Nous n'acceptons pas les décisions disciplinaires du concile de Trente, et nous n'acceptons ses décisions dogmatiques que dans la mesure où elles concordent avec l'enseignement de l'Église ancienne.
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6. Considérant que la sainte eucharistie est depuis toujours, dans l'Église catholique, le centre véritable de la liturgie, il est aussi de notre devoir de déclarer que nous gardons avec fidélité et dans son intégrité l'ancienne foi catholique envers le saint sacrement de l'autel, en croyant que nous recevons le corps et le sang de notre Seigneur Jésus-Christ lui-même sous les espèces du pain et du vin.
L'action liturgique dans l'Église n'est pas une répétition continuelle ou un renouvellement du sacrifice que le Christ a offert sur la croix une fois pour toutes; cependant, son caractère de sacrifice réside dans le fait qu'elle est la mémoire permanente et une représentation réelle, sur la terre, de ce sacrifice unique du Christ pour le salut de l'humanité sauvée, qu'il offre sans cesse au ciel, selon He 9, 11-12, en paraissant pour nous devant la face de Dieu (He 9, 24).
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Voilà le caractère de l'eucharistie en ce qui concerne le sacrifice du Christ - en même temps elle est un repas sacré dans lequel les croyants qui reçoivent le corps et le sang du Christ sont en communion les uns avec les autres (1Co 10,17).
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7. Nous espérons qu'en se tenant fermement à la foi de l'Église indivise les théologiens réussiront à aboutir à un accord sur les divergences nées des schismes dans l'Eglise. Nous exhortons les clercs placés sous notre direction à souligner, en prêchant et en enseignant, en premier lieu les vérités chrétiennes essentielles communément professées par les confessions séparées, à éviter consciencieusement toute violation de la vérité et de la charité dans l'exposé des divergences encore existantes et à apprendre, par la parole et par l'exemple, aux croyants de nos paroisses à se comporter envers les membres de confessions différentes comme en conformité avec l'esprit de Jésus-Christ notre Sauveur à tous.
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8. C'est par notre fidèle attachement à l'enseignement de Jésus-Christ, par notre rejet de toutes les erreurs qui, par la faute des hommes, y ont été mêlées, de tous les abus cléricaux et ambitions hiérarchiques, que nous pensons pouvoir combattre le plus efficacement ces maux majeurs de notre temps: l'incrédulité et l'indifférence en matière religieuse.
Donné à Utrecht, le 24 septembre 1889.
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Johannes Heykamp. Casparus Johannes Rinkel. Cornelius Diependaal.
Joseph Hubert Reinkens. Eduard Herzog.
Nouvelle traduction. Une version antérieure se trouve dans Procès-verbal de la XVIe session du Synode national de l'Eglise catholique-chrétienne de la Suisse, Séance du 29 Mai 1890 tenue dans la salle du Grand Conseil à Berne, Genève (Taponnier et Studer) 1890, 25-38. On retrouve ce texte (sans le préambule) dans les ouvrages d'Urs Küry, Chemins vers la vérité. Lettres pastorales, Genève (Labor et Fides) 1980, pp 29-31 et de Berend Willem Verhey, L'Eglise d'Utrecht, Utrecht] 1984, p. 273. Une autre version, faite sur une adaptation du texte allemand original (cf. Walter Herzog, Dokumente zu den Unionsbestrebungen des Altkatholizismus, IKZ 15, 1925, 13-15) est parue dans la Revue ISTINA 5 (1958) 57-59.